Si vous êtes de ceux qui croient à l’existence d’un être supérieur, qu’il se nomme Dieu, Yahvé, ou Allah, et qui, non content de faire la pluie et le beau temps , régirait tous les détails de votre vie et de votre mort, ne lisez pas ces lignes car elles traitent d’un ouvrage qui a toutes les chances de vous irriter. Irrité, il l’était ce cardinal entendu récemment à la radio qui traitait ce livre de « tissu d’insultes », réaction assez éloignée de la charité chrétienne et du pardon des offenses.
Par contre, si vous estimez que toute religion est au mieux un aveuglement, au pire une entreprise de superstition, si vous pensez que l’état de santé du pape encombre nos journaux télévisés plus que de raison, si vous croyez que chez les terroristes de tous pays et de tous temps la religion est un alibi bien commode, précipitez-vous sur ce bouquin pas philosophiquement correct, certes, mais qui change un peu du discours ambiant. Puisque vous savez que vous retournerez poussière et qu’il n’y a qu’une vie, vous apprécierez qu’on vous invite à la déguster en refusant les interdits fondés sur des principes dont la légitimité n’a jamais reçu le moindre début de preuve. « ...faire et ne pas faire, dire et ne pas dire, penser et ne pas penser, agir et ne pas agir...les textes religieux abondent en codifications existentielles, alimentaires, comportementales et autres...Car on ne mesure bien l’obéissance qu’avec les interdits. Plus ils pullulent, plus grandes sont les occasions de fauter, plus les probabilités de perfection s’amenuisent, plus la culpabilité augmente. Et c’est une bonne chose pour Dieu -du moins le clergé qui s’en réclame !- de pouvoir jouer avec ce puissant ressort psychologique ».
La lecture de cet ouvrage vous paraîtra -comment dire ?- roborative. Ce sera comme une bouffée d’oxygène dans notre atmosphère encore embrumée par les miasmes du penser obligatoire instillé par la religion et qui, si on n’y prend garde, prétend encore aujourd’hui, à l’époque où l’homme est capable d’aller sur la Lune, inspirer nos idées et nos actes.
On l’aura compris, le philosophe mécréant Michel Onfray s’en prend d’abord à la prétention que manifestent les trois religions monothéistes à vouloir nous manipuler. Baptême, circoncision, tchador, même combat. Et il le fait en des termes vifs, directs, qui, par moments, ne sont pas très loin de ceux d’un pamphlet. D’où, sans doute, l’irritation du cardinal cité plus haut. Il est vrai que, philosophe pour philosophe, le langage d’Onfray ferait passer Sartre pour un premier communiant, si on ose cette image pieuse. Mais pour une fois qu’un philosophe utilise les termes du commun des mortels, ne chipotons pas car c’est peut-être le meilleur moyen de diffuser la philosophie.
« Traité d’Athéologie », Michel ONFRAY, Editions Grasset, 18,50 €