Nous n’avons pas l’habitude de traiter dans ces colonnes de ce qui se passe à Paris, sauf évènement majeur ou remarquable, or il se trouve que cette exposition traite d’un sujet à la fois ancestral pour de nombreuses cultures tribales, à la fois actuel pour notre culture occidentale, et à la fois universel. “Signes du corps” traite du corps comme support : support du parcours initiatique au sein du groupe (le corps-rituel), support d’une expression de différenciation, d’identité ou d’exutoire (le corps-transgression), ou support d’une oeuvre d’art ou d’une écriture (le corps-tableau).
Les diverses écritures sur le corps y son évoquées : tatouages, scarification, piercing, implants, branding (marquage par le feu), peinture, maquillage, incrustations des dents, etc.
Une centaine de pièces issues de musées et de collections, sculptures, masques, objets, tous plus fantastiques les uns que les autres, éclaire ces actes “depuis longtemps ancrés dans des systèmes symboliques complexes et qui nourrissent aujourd’hui les esthétiques des sociétés occidentales”.
S’y trouve incluse en préambule une exposition de photographies d’Alain Soldeville qui nous dévoile ces corps d’aujourd’hui modifiés par divers traitements. Et c’est également pour cette raison que j’en parle aujourd’hui : rappelez-vous, en juin 2001, j’écrivais mon premier article pour yaquoi.com sur l’exposition d’Alain Soldeville intituléé “Modifications corporelles”, lu à ce jour par plus de 7 000 internautes ! C’était au Centre d’Art du Bosphore, à La Seyne. voir
l’article.
Aujourd’hui, dans ce sanctuaire qu’est ce Musée, les images de Soldeville prennent toute leur ampleur et leur signification. Ces grands formats sélectionnés pour la circonstance ( les moins “dérangeants”), magnifiquement tirés, sont accompagnés d’un cartel qui explique par un texte court autobiographique la démarche de chaque modèle.
“Les " Paroles du corps " parlent de la fragilité de la condition humaine en associant les images mentales induites par les textes aux images photographiques. Elles amènent, par là même, le spectateur à s’interroger. Grâce à leurs paroles, les personnes photographiées participent au projet artistique (...). Les “Paroles du corps” parlent également du rapport au monde, à l’environnement social, urbain.
Modifier son corps, d’une manière superficielle ou extrême, est un moyen de se réconcilier avec soi-même et les autres, de se reconstruire. Par des détails mis en lumière ou laissés dans la pénombre, photographiés à distance ou en gros plan, ces corps sont contemplés comme des paysages, des objets sculpturaux. Les scarifications, les tatouages, les implants sont autant de traces, de lignes, de sillons béants inscrits à la surface de la peau”, extrait du texte d’Alain Soldeville, site
“C’est bien l’essence même d’une philosophie que donnent à voir ces portraits. Ils font surgir le désir, parfois exacerbé, de façonner sans cesse le corps soumis à l’exigence extrême : lui donner une nouvelle identité, lui offrir le statut d’oeuvre d’art. Les interventions(...) qualifient et esthétisent chaque surface de peau décorée, chaque partie du corps transformée.”, Christine Falgayrettes-Leveau, commissaire.
Exposition singulière où se mêlent art et mysticisme, souffrance et beauté, transgressions et traditions. psychologie et archétypes. Si vous allez à Paris, visitez l’exposition du Musée Dapper site :, 35 rue Paul Valéry, 16ème, c’est jusqu’au 3 avril. Et si vous désirez préparer cette exposition, rendez-vous auparavant sur la place Puget de Toulon le vendredi : M. Legangneux expose et vend une multitude d’objets anciens venus d’Afrique, statuettes, masques etc, de qualité, qui vous donneront un avant-goût de “Signes du corps”.
Très beau catalogue au prix de 25 € seulement.
Les images ci-dessus sont publiées avec l’assentiment du Musée Dapper et d’Alain Soldeville, non affilié