Aux abattoirs de Chicago règnent d’un côté, les fabricants
de viande en conserve, de l’autre le choeur des employés
qui font les frais de leur concurrence sauvage. Entre les
deux, les « chapeaux noirs », groupe caritatif et religieux.
Sainte Jeanne des abattoirs est une pièce cruelle et sauvage,
une dénonciation de la nécessité prétendument naturelle
du capitalisme et de sa justification religieuse. Parti d’une
analyse de la dérégulation du marché de la viande à Chicago
pendant la crise économique de 1929, Brecht a inventé
une situation archétypale qui se prête bien à une actualisation
contemporaine.

Il y a trente ans, aux grandes heures du théâtre militant,
la pièce était un classique du genre ; il y a quinze ans,
elle n’intéressait plus aucun metteur en scène. Aujourd’hui,
la roue de l’histoire revient sur Sainte Jeanne. Servi par la
mise en scène de Catherine Marnas, brillante de vigueur
et d’intelligence, à la fois critique et spectaculaire, le texte
de Brecht impressionne à nouveau par sa pertinence et
son actualité.

Installée à Marseille à la tête de sa compagnie, un temps
assistante et collaboratrice d’Antoine Vitez et de George
Lavaudant, Catherine Marnas rend en effet toute son actualité
à ce joyau de « limpide complexité », interprété par onze
acteurs et un choeur constitué d’un groupe d’amateurs.