Les Wampas déclenchent l’apocalypse au Gaou

Une des guitaristes de Maximum Kouette m’avait pourtant averti : "Les Wampas, c’est pour les radicaux, c’est pas pour les badauds". Son sens du rythme syntaxique et son enthousiasme m’avaient convaincu.

Mouais.
Désolé, mais j’ai du louper un épisode ; je suis resté spectateur passif, voire ennuyé, tout au long du concert, ce qui n’était bien entendu pas le but recherché.
Mais avant tout, plantons le décor : une batterie au fond, une basse à gauche toute et deux guitares entourant le chanteur, Didier Wampas - toutefois lorsque celui-ci est sur la scène. Et une grosse enseigne "WAMPAS" clignotante, suspendue au fond de la scène. Si les musiciens, d’une classe folle et d’une puissance musicale indescriptible, restent stoïquement au quasi même endroit pendant 2 heures, Didier Wampas ne tient pas en place.
Arrêtons-nous un instant sur lui, d’autant plus qu’il faut avouer que le groupe est sa "chose" : croisement foireux d’Iggy Pop et de Johnny Rotten, arborant - au début - un immonde tee-shirt Bad Boy 55, il chante comme une castafiore enrouée et martyrise parfois une guitare à l’aide des trois accords et demi qu’il connaît.


Musicalement, le concert se rapproche souvent du n’importe quoi, avec cependant une forte influence des 50’s américaines et du punk français du début des années 80. C’est du rock’n roll pur et dur (contrepétrie belge). Les titres s’enchaînent : "Ce soir, c’est Noël", bon vieux titre punk-rock avec pillage en règle des riffs des Sex Pistols et de l’énergie des Bérus (c’est mon titre préféré, et de loin, des Wampas) ; "Manu Chao", morceau efficace mais assez horripilant au bout de trois écoutes - si j’étais méchant, je dirais que c’est l’équivalent de "Ca plane pour moi" pour les Wampas (gageons que Didier ne finira jamais présentateur d’un jeu télévisé catastrophique et météorique sur le service public) ; puis un titre calme où Didier descends dans le public et fait asseoir tout le monde.

Puis l’apoclaypse. Mais crescendo. Le vent se lève, d’abord rafraichissant, puis, gagnant en énergie, il projète du sable dans les yeux des spectateurs et sur les corps des musiciens, que l’on distingue noyés dans un nuage de poussière. La scène devient surréaliste, les techniciens doivent décrocher l’enseigne WAMPAS, ainsi que toutes les toiles, y compris celles des intermittents du spectacle en lutte.

Tel un pianiste de saloon au cours d’une bagarre générale (j’ai trop lu Lucky Luke ...), le groupe poursuit : "Keith", plainte vocale interminable, digne du pire du mauvais rock progressif des années 70 ; "Où sont les femmes ?" de Patrick Juvet, la traditionnelle reprise moisie ; "Petite fille", morceau au cours duquel les jeunes filles sont conviées sur la scène, les Maximum Kouette y déboulant aussi, suivies de leurs fidèles Micky et Mafalda (comment dire ? ils ressemblent à des joueurs de rugby transexuels et fans de Chantal Goya), puis de deux dames habillées en peau de vache qui mettent à poil Didier Wampas, et réciproquement. C’est un peu la foire. Puis, toujours dans la tempête, mais avec une scène vidée de ses demoiselles et de ses éléments fragiles, "Quelle joie le Rock’n Roll". Effectivement. Puis une goutte. Et deux. Puis des dizaines ... Muni de mon badge "Presse", je me réfugie lâchement backstage, comme on dit. Et c’est le gros orage, avec éclair et pluie et tout le tintouin. On dirait la fin du monde. Ou au moins la fin du concert. Pas de rappel, rien, pas possible, c’est l’affolement.

Conclusion : vu ce final apocalyptique, Didier Wampas doit être une espèce de Dieu du Rock’n Roll. Ou le Diable en personne. (petit souci : l’envoyé spécial de Yaquoi.com était ce soir-à un athée convaincu).

Stéphane, pour Yaquoi.com.

Site génial des Wampas


Interview, par Stéphane, pour Yaquoi.com.

Yaquoi.com : Que penses-tu de la reconversion de Jalabert en commentateur sportif ? (allusion à une de leurs précédents chansons)
Didier Wampas : Bien, ça me fait plaisir de l’entendre. Je suis pour. Même s’il n’a pas gagné le Tour (Ndlr : comme Didier l’avait prédit à l’Equipe Magazine), ça reste Jaja.

Y. : Jusqu’où peux-tu partir en vacances à présent, vu les ventes du morceau "Manu Chao" ?
D.W. : Pas bien loin, car je n’ai encore rien touché, faut attendre un an. Mais je suis content d’être ici, je ne connaissais pas le site.

Y. : Qui est cette jeune fille dont il est question dans le morceau "Liste de droite" ? On veut des noms ...
D.W. : Pas de nom. Mais elle a même failli chanter dans les Wampas, tout au début, il y a plus de 20 ans.

Y. : Comment se passe la conception des albums, sachant que tu bosses à la RATP et que les autres sont intermittents ?
D.W. : Je bosse en 3*8. Et c’est moi qui écrit les chansons, donc on a moins besoin de répéter.

Y. : Tu écris beaucoup d’hymnes (à Patrick Juvet, à 30 millions d’amis ...). A quand un hymne à Jean-Jacques Aillagon ?
D.W. : Normalement, je ne fais des hymnes que longtemps après la mort des gens.

Y. : Mais, Patrick Juvet ... il est encore vivant !
D.W. : Oui oui. Et attention, pas de mal de Patrick devant moi. Il est très gentil.

Y. : Dans le clip de "Manu Chao", il y a des stars du Show Biz toutes les deux secondes : Patrick Juvet donc, Jack Lang et plein d’autres. Ce sont des amis ?
D.W. : Non, je ne connais personne. C’est la première fois que je voyais Patrick Juvet. Et les gars du Groland sont des copains de Jo (un des guitarites).

Y. : Que deviennent tes habits de scène ?
D.W. : Il y en a là derrière, dans la malle. Et j’en balance plein sur scène, je les déchire. Je les jette, je les donne, je les garde et après ils moisissent.

Y. : Et le grand jeu concours pour habiller Didier Wampas (voir sur le site) ?
D.W. : Ca dépend des soirs. Là, j’ai eu un petit veston (Ndlr : tout en aluminium, charmant).

Y. : Pourquoi du Punk Yéyé, et pas du Heavy Musette ?
D.W. : Parce que le heavy musette, c’est tout pourri. Et puis, le Punk Yéyé, c’est ce qu’on aime, ce qui n’est pas le cas de la musette. Et ce n’est pas un concept, le Yéyé punk, il se trouve que c’est comme ça ; pas comme certains qui disent : "on va faire du salsamuffin" ...

Y. : Et quels artistes trouves-tu encore punk ? Du moins dans l’esprit ...
D.W. : Des gens comme Jonathan Richman. Ou Jean-Luc le Ténia, qui est parfois sur scène avec nous.

Y. : Et des groupes "Rock’n Roll" ?
D.W. : Bof ...

Y. : Johnny ?
D.W. : Peut-être quelque part. Respect quand même, pour ce qu’il a fait avant.

Y. : Et ton public ? Qui est plutôt jeune, branché, cultivé, petit-bourgeois, lecteur de Télérama ... Ne trouves-tu pas étonnant qu’il écoute du Punk-yéyé ?
D.W. : Non, pas vraiment. En France, le rock, c’est un peu ça. Regarde Noir Désir, c’est les classes moyennes. Les mômes des cités ne vont pas écouter Noir Désir. Ni les Wampas. Ni Mickey 3D. Faut une certaine culture en France pour écouter de tels groupes. Si tu regardes M6 et que tu écoutes NRJ, tu n’as aucune culture Rock’n Roll. Mais ça ne me dérange pas, d’un côté. Si tu regardes la musique classique, c’est encore plus élitiste, 45 ans ...
Mais ce n’est pas génant, il faut que la culture tire les gens vers le haut. Et les gens très cultivés aussi, qui pourront eux-mêmes en tirer d’autres vers le haut.
Mais il y a des mômes pour qui, aujourd’hui, le rock est ce qu’était le jazz pour nous il y 20-30 ans.

Y. : Et justement, le rap a un peu pris la place du rock il y a quelques années. Et maintenant, c’est quoi, à la place ?
D.W. : Pfiou ... Le trou noir. Les gosses d’aujourd’hui ont Star Ac’ ...

Y. : Et quels conseils donnerais-tu à un adolescent aujourd’hui pour se plonger dans le Rock’n Roll ? si toutefois il faut donner un conseil.
D.W. : Est-ce que c’est la peine ? Tu vois, moi je suis tombé là-dedans quand j’avais 15 ans, parce que c’est ce qui me correspondait le mieux, c’est comme ça que je vivais l’époque. mais je ne suis pas persuadé que le Rock’n Roll soit mieux que le reste. Si le Rock’n Roll m’a sauvé la vie, je suis peut-être 1 sur 100 ; j’ai plein de potes qui ont mal fini et qui étaient à fond là dedans. Est-ce que c’est mieux que la poésie, la danse classique, l’accordéon ou la peinture ? Je ne sais pas.
Mais pour moi, le Rock’n Roll, ça n’a jamais été destroy, No Future et compagnie. Avant, j’étais mal dans ma peau, je n’avais pas trop de copains ... Et quand le Punk est arrivé, ça m’a rendu heureux, j’ai rencontré des gens comme moi, ça a été quelque chose de positif.
Mais est-ce que je conseillerais ça à des jeunes ? Je préférerais que mes enfants continuent leurs études le plus longtemps possible, plutôt qu’ils ne sniffent de la colle ...

Posté le 1er août 2003