Les FFKK - pour les intimes - se sont formés à Lorient en 94. Autant dire que les ports militaires, ils connaissent mais que c’est aussi le seul point commun entre la mentalité toulonnaise et la mentalité bretonne. Nous ne dirons rien sur les différences de pourcentages de vote à l’extrême droite en Armorique et en Basse Provence.
La politique est pourtant un vecteur de réflexion important chez ce groupe. Nico (batterie), D’jey (guitare), Bux2 (basse et choeur), Toni (claviers) et Bring’s (chant) sont des citoyens du monde. FFKK « veut donner son point de vue sans pour autant devenir un parti politique. Le but premier reste la musique...avec sa part d’éveil ». Mais ce nom : pourquoi King Kong ? « Parce que ça claque bien et que ça peut se décliner en version politique » qu’ils disent. Freedom For King Kong, c’est une invitation à s’épanouir, à « libérer la primate qui est en nous ». A première vue, libérer des instincts primaires chez l’homme rebute un peu, mais c’est vrai que la technologie ne se met pas automatiquement au service du plus grand bien et sert trop souvent à l’anéantissement des peuples. Cet appel à nos cousins gorilles se veut un manifeste de refus de la « sodocratie » : une révolte permanente contre l’apathie des citoyens et la volonté d’apporter sa pierre à l’édifice pour mettre à bas « l’illusion du pouvoir du peuple » dont nos gouvernants se délectent.
Leur moyen à eux d’éviter tout étiquetage et de réveiller les personnes endormies, c’est la musique et les concerts. C’est ce partage, cette rencontre avec le public qui leur permet de s’exprimer et de refuser l’abrutissement. Sur scène, le décor d’engrenages à la Temps Modernes de Chaplin marque ce de quoi il faut s’éloigner en protégeant et en développant sa part de rêve. Un esprit de Peter Pan, festif et épicurien.
Les FFKK ont pourtant connu pas mal de galères, changeant plus ou moins malgré eux de maison de disque (Boucherie Prod. qui a mis la clef sous la porte, Mosaïc avec qui ça se passait pas bien) et même en navigant sans pendant quelques temps. Mais « le groupe est un peu comme un trampoline : ensemble, ça permet de rebondir ». Avec trois albums à leur actif, ils sont tout de même plus productifs que Laurent Voulzy. Chaque album se fait à l’envie, avec bien entendu, une part de limites matérielles qui fait qu’il faut à un moment s’arrêter et passer à un autre morceau. Mais grâce à cette envie, les Freedom trace de façon autonome leur route et cultive sans appréhension le contre-pied. « La confrontation est un risque mais ça apprend » et ça les pousse à se tourner « vers une idée universelle, par de la musique pour que le résultat interpelle ».
En dix ans de carrière, les Freedom sont aguerris à la scène comme à la ville. La salle de l’Oméga Live n’est pas pleine mais ça slame. Il faut dire qu’FFKK ne font pas dans la ballade. C’est de la fusion, avec un flow ragga qui fait penser à de l’Asian Dub Fundation un peu plus métal. Bring’s en impose avec sa voix et surtout ses yeux qu’il écarquille comme s’il voulait nous faire peur en e pendant au fil de son micro. Il est secondé efficacement par les choeurs de Bux2 qui pourrait sans doute rivaliser avec Max Cavalera si les morceaux l’y autorisaient. D’jey, avec sa belle chemise et son chapeau oriental, démange sa gratte en passant tranquillement d’un bord à l’autre de la scène avec son allure d’anarchiste paisible. Toni, lui, balance sa crinière au-dessus de ses claviers et maudit sa manie de glisser quelques imperfections inaudibles pour les spectateurs au sein des partitions. - attention Toni ! maintenant on sait qu’il faut que tu sois plus concentré dans tes concerts. Derrière sa batterie Nico martèle sans trop s’agiter les refrains de son groupe préféré. Entre une pique contre Sarkozy, une dédicace à MacZde et une citation de Lofofora, les Freedom nous ont bien régalés.
Alors, les Freedom For King Kong passent près de chez vous : « Souriez ! »*